Les différences de techniques entre la guitare hawaïenne et le blues

 

c) Les différences de techniques entre la guitare hawaïenne et le blues.

Si les points de convergence sont nombreux tant sur l’histoire de la musique hawaïenne et du blues que sur leurs pratiques instrumentales,  en particulier à travers la guitare slide, l’approche de ces deux courants se veut stylistiquement et socialement distincte, et ce sont ces disparités qui dicteront l’évolution de chacun des genres.

Il est en premier lieu notable que la guitare slide dans le blues a subit l’influence majeure de la musique hawaïenne, déjà en vogue depuis quelques années lors de la cristallisation du blues, et cette émulation joue évidemment un rôle important dans le style de ce dernier. Pourtant, il est frappant de constater que le parallélisme historique et sociologique ayant préludé à l’adoption de la guitare slide dans le blues et la musique hawaïenne, donne lieu à la naissance presque simultanée, et en tout cas en toute indépendance, de caractéristiques communes aux deux genres.

Ainsi l’adoption de la guitare européenne, stimulée par les qualités et commodités intrinsèques de l’instrument, et son adaptation par les protagonistes des deux styles ongletsconnaissent-elle des similitudes caractéristiques. Ceci est le cas de l’utilisation des onglets à la main droite, puisque les guitaristes slide, tant de blues que de la musique hawaïenne, se servent le plus souvent d’onglets métalliques à l’index et au majeur, et d’un onglet en plastique sur le pouce, même si des exceptions notables des deux courants varient le nombre d’onglets ou laissent leurs doigts nus. Ces similitudes se retrouvent aussi particulièrement dans l’emploi des accordages ouverts, appelés « open tunings » utilisé tant en blues qu’en musique hawaïenne, qui permettent un jeu ou les basses sont dissociées des lignes mélodiques, et, pour le slide, la possibilité d’obtenir des accords en barrant l’intégralité d’une case de la touche de la guitare par un objet. Il n’est d’ailleurs pas anodin que seuls certains accords soit facilités par cette technique, puisque si il est aisé d’en obtenir des accords tonalement forts et caractéristiques des styles musicaux populaires, en particulier ceux des degrés I, IV et V, il reste difficile voir impossible d’obtenir les accords des autres degrés sans altérations. Malgré cette commune utilisation d’accordages ouverts, ceux-ci diffèrent traditionnellement d’un style à l’autre puisque le blues voit généralement l’utilisation des « open tunings » de ré et de sol, qui comportent respectivement, du grave à l’aigue, les notes ré, la, ré, fa#, la, ré et ré, sol, ré, sol, si, ré, la guitare hawaïenne quant à elle voit le plus souvent l’utilisations des « open tunings » de la et de mi, avec les notes la, do#, mi, la, do#, mi et mi, la, mi, la, do#, mi. Il faut toutefois noter que les accordages de sol et de la connaissent des doigtés équivalents et qu’ils se retrouvent dans des œuvres des deux courants, illustrant le fait qu’en matière d’accordage, aucune règle stricte ne s’impose et que l’on en retrouve de nombreux autres dans chacune des traditions.

Malgré ces similitudes dictées tant par la tradition que par des contraintes techniques, la guitare slide connaît plusieurs différences fondamentales de la tradition du black_aceblues à celle de la musique hawaïenne. Cela est particulièrement le cas pour ce qui est de la tenue de l’instrument. En effet, si les bluesmen tiennent leurs guitares de manière traditionnelles, position dite « espagnole », et utilise le plus souvent un bottleneck ou un morceau de tuyau métallique glissé sur l’annulaire ou l’auriculaire, les guitaristes hawaïens, eux, tiennent leurs guitares posées à plat sur les genoux en utilisant une « steel bar » morceau de métal poli tenu entre le pouce et le majeur. On appelle traditionnellement la position hawaïenne « lap steel », lap signifiant genoux, « steel guitar », ou encore « lap guitar », tandis que la position blues est affublée du terme générique de « slide guitar » ou « bottleneck guitar ». Il faut relever toutefois le fait que la position hawaïenne, qui sera aussi de mise dans la musique country, est utilisée par quelques représentants du blues tels que Tampa Red, Black Acesample ou encore Charley Patton, mais ceux-ci restent par là marginaux.

Cette distinction fondamentale dans la tenue de la guitare entraîne par ailleurs des spécificités propres à chaque style, une position permettant des techniques impossibles sur l’autre. Ainsi l’avantage de la position traditionnelle du blues est la possibilité d’utiliser le jeu aux doigts parallèlement à celui du slide, trois doigts restant disponibles pour des doigtés standard si le slide ou le bottleneck est porté à l’auriculaire, comme c’est le plus souvent le cas. C’est par cette possibilité que l’on retrouve alternativement dans le blues des phrases tantôt très rythmiques, par des accords joués sur la touche par les doigts, et mélodiques, jouées en slide, tout l’art consistant en l’échange de ces rôles rythmiques et mélodiques par le slide ou les doigts. Les représentants du blues se spécialisent conséquemment généralement dans l’une des deux techniques contingentes : soit l’utilisation de la main gauche sous forme d’accords ou de séquences rythmiques pendant q’une phrase est chantée, puis ponctuée d’une courte ligne de slide contrastant avec cette séquence, soit l’usage d’une ligne mélodique au slide imitant et alternant une phrase chantée, le tout accompagné d’une basse alternée sur la tonique et souvent la dominante. A contrario, la guitare hawaïenne joue l’intégralité de la mélodie, souvent en staccato, accompagnée là aussi d’une basse alternée sur les degrés I et V avant d’éventuellement laisser entendre le chant, la ligne de basse étant cependant fréquemment remplacée par l’ajout d’une seconde guitare ou d’un ukulélé. La position horizontale de la guitare hawaïenne interdit de plus au contraire toute utilisation des doigts de la main gauche. En revanche, cette particularité permet un ensemble d’effets, impossible en position espagnole, comme la faculté d’obtenir des accords plus variés en slide, en général de simples triades, en inclinant la « steel bar » sur les cordes, permettant alors d’appuyer trois cordes adjacentes sur des cases elles aussi attenantes. La position hawaïenne facilite de plus grandement les vibratos, abondamment employés en musique hawaïenne, et ainsi de palier aux difficultés de justesse entraînées par certaine positions d’accords. Il existe encore toute une palette d’effets communs à la guitare, qui restent possible avec les deux techniques, mais qui deviennent plus ou moins aisées selon l’emploi de l’une ou l’autre. Dès lors la technique du blues favorise-t-elle une certaine vigueur dans l’attaque des accords, les roulements sur plusieurs cordes, ou encore toutes les techniques de la guitare traditionnelle, grâce aux doigts laissés libres, comme les tirés, appelés « bend »,  les « hammer-on », ou les « pulling-off ». La technique hawaïenne, de son coté, facilite l’emploi des harmoniques artificielles, permises par les onglets, et des « hammer-on » et « pulling–off » avec la steel bar plutôt qu’aux doigts, grâce au fait que l’action des cordes de la guitare y soit surélevée.

Il est donc de fait que l’histoire des courants musicaux ayant préludé à l’adoption de la guitare slide dans le blues et la musique hawaïenne a très largement orienté leur pratiques respectives, qui ainsi connaissent de nombreuses similitudes engendrées tant par le contexte social que par des contraintes techniques entraînées par l’utilisation du slide. Il est de plus frappant de noter au contraire les dissemblances stylistiques et techniques de chaque courant, engendrés soit par des choix esthétiques, soit par des différences d’approche de la guitare slide. Mais l’orientation musicale de la guitare slide dans le blues et la musique hawaïenne est aussi fortement subordonnée à leur diffusion aux vus du rapide succès de ces deux musiques faisant entrer en jeu des considérations d’ordre plus financier. Cette évolution est de plus soumise aux interactions et influences réciproques des deux traditions puisque l’existence de chacun de ces courants musicaux n’échappe en rien à l’autre courant, et ce dès leurs origines.

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